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Prendre de meilleures décisions dans l’urgence en se créant de l’espace

 Christian Lapointe

Avez-vous déjà ressenti une boule à l’estomac lorsqu’on vous demande de prendre une décision ? Êtes-vous tenté de répondre rapidement pour dissiper ce malaise ? Que faire dans ces situations ?

L’importance des décisions

Commençons par identifier les situations où ce sentiment d’urgence peut survenir.

source wikipédia.fr

Il existe différents niveaux de décisions. Pour les catégoriser, j’aime utiliser la matrice d’Eisenhower, même si celle-ci a été initialement conçue pour la priorisation des tâches.

Cette matrice s’articule autour de deux axes : l’urgence et l’importance.

Par importance ici on parle de l’impact des décisions et de l’ampleur des conséquences si on se trompe.

Décisions non importantes : urgentes ou non

La sensation de malaise survient rarement pour une décision peu importante, qu’elle soit urgente ou non. Il convient donc de se concentrer sur les décisions importantes, celles qui peuvent avoir des répercussions significatives. Ce sont ces conséquences potentielles qui nous angoissent, souvent inconsciemment.

Décisions importantes mais non urgentes

Pour les décisions « importantes » mais « non urgentes », nous disposons de temps pour réfléchir, consulter notre entourage et recueillir différents points de vue avant de nous décider. Cela permet d’éviter une décision hâtive et d’espérer faire un choix judicieux. Néanmoins, cela ne signifie pas que l’anxiété disparaîtra tant que la décision ne sera pas prise. Ce sujet fera l’objet d’un prochain article. Aujourd’hui, concentrons-nous sur les décisions classées comme « importantes et urgentes ».

Décisions importantes et urgentes

Voici quelques exemples de décisions à la fois importantes et vraiment urgentes :

  • Une chirurgienne en pleine opération doit prendre des décisions immédiates pour éviter le décès de son patient.
  • Un conducteur doit parfois prendre une décision rapide pour éviter un accident grave, voire fatal.

Cependant, en dehors de ces professions d’urgence (pompiers, secouristes, etc.) et d’autres situations où des vies sont en jeu, peu de décisions nécessitent vraiment d’être prises dans l’instant.

Urgence réelle ou précipitation ?

Le problème survient souvent lorsqu’une forme d’urgence est exagérée autour d’une décision importante. Cette pression peut venir de nous-mêmes, de notre interlocuteur ou du contexte :

  • Un supérieur hiérarchique pose une question, et nous pensons devoir répondre sur-le-champ.
  • Un collègue sollicite notre avis, et nous nous sentons obligés de fournir une réponse immédiate en tant qu’expert.
  • Une offre commerciale sous pression nous pousse à accepter immédiatement, sous peine de la voir disparaître.

Les risques et les conséquences d’une mauvaise décision créent un malaise, et notre inconscient nous pousse à vouloir sortir rapidement de cette situation inconfortable, ce qui peut engendrer un faux sentiment d’urgence.

Nous réalisons parfois a posteriori que notre décision a été précipitée, et nous nous surprenons à dire :

  • « Zut, je n’ai pas pensé à cet aspect. »
  • Ou encore : « Si j’avais su, j’aurais répondu différemment. »

Les réponses hâtives nous font souvent négliger de nombreux paramètres importants.

Système 1 et Système 2

Cette théorie des systèmes met en avant l’idée que nous possédons deux modes de pensée distincts. (Tiré du livre « Thinking, Fast and Slow », 2011 – Daniel Kahneman)

Le système 1

Le système 1 est notre « cerveau ancien », celui qui s’est développé au cours de la préhistoire. C’est le cerveau de la survie, parfois appelé cerveau reptilien. Face à un danger, il réagit instantanément. C’est grâce à lui que nous pouvons éviter les accidents ou nous mettre automatiquement en position de protection face à un chien qui grogne. C’est notre mode de pensée rapide, instinctif et émotionnel.

Mais ce système 1 est aussi un cerveau « paresseux » : il prend des décisions basées sur des schémas et des expériences passées, sans nécessairement prendre en compte le contexte actuel.

Ce sont les connaissances, l’expérience et l’expertise d’une chirurgienne ou d’un conducteur de bus qui leur permettent de réagir rapidement, presque par réflexe.

Cependant, c’est aussi ce système qui est influencé par nos biais cognitifs, nos préjugés, nos stéréotypes et nos idées préconçues. Par exemple, lorsque mon supérieur me demande d’accomplir une tâche, je peux avoir le réflexe de penser qu’il s’attend à ce que j’accepte sans discuter, plutôt que de le questionner.

Le système 2

Le système 2, quant à lui, nous permet de prendre le temps de considérer chaque situation comme unique et de chercher la réponse la plus appropriée. Il s’agit de faire l’effort conscient de freiner notre réponse réflexe pour nous accorder un temps de réflexion. C’est un mode de pensée plus lent, plus réfléchi et plus en accord avec nos valeurs.

Pour commencer, il est essentiel d’être à l’écoute de soi-même. Cette fameuse boule au ventre dont nous parlions au début de cet article est un signal d’alerte de votre corps. Votre inconscient a détecté une décision importante qui pourrait avoir des conséquences ; il perçoit un danger et voudrait y répondre rapidement. Le piège serait de céder à cette fausse urgence. Cette pression est souvent auto-imposée ou vient de l’extérieur, mais honnêtement, en dehors des situations de vie ou de mort, existe-t-il vraiment des décisions qui ne peuvent pas attendre au moins cinq minutes de réflexion ?

Se créer de l’espace

Commençons par nous créer un peu d’espace. Prenons une profonde respiration et posons une simple question telle que :

  • « Puis-je prendre cinq minutes pour y réfléchir ? »
  • « Serait-il possible que je revienne vers vous plus tard avec ma réponse ? »
  • « Pourrions-nous prendre quelques minutes pour en discuter ? »
  • « Pour quand avez-vous besoin de cette réponse ? »

Évidemment, ce n’est pas une solution miracle pour trouver la décision parfaite. Je peux encore me tromper, mais il est plus facile d’assumer une décision réfléchie que celle prise sous la pression d’une urgence, surtout si le niveau d’urgence n’était pas justifiée.

Et maintenant, que faire de ce temps supplémentaire pour maximiser nos chances de prendre une décision éclairée ?

  • Explorer ce qui est important pour soi et pour les autres dans cette décision
  • Envisager différentes perspectives et les valider
  • Identifier les critères pour évaluer si la décision que je m’apprête à prendre est la bonne

Nous explorerons ces aspects dans de prochains articles.

Vous pouvez également approfondir ces compétences lors de notre formation « Prendre des décisions assumées et responsables : Maîtriser les compétences clés pour des décisions éclairées ».

(Photo mise en avant de Jens Lelie sur Unsplash)


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